Le come-back de Baquet

Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
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1988 / 24' / France • DCP (d'après 16 mm) • Son mono

En Juillet 1956, l’acteur et violoncelliste Maurice Baquet réalisait, avec l’alpiniste Gaston Rebuffat, la première ascension de la face sud de l’Aiguille du Midi (3842m), magnifique paroi de granit rouge se dressant comme un rempart au-dessus de la Vallée Blanche, dans le Massif du Mont-Blanc…

32 ans plus tard, comme pour saluer la mémoire de son ami Gaston, Maurice Baquet gravit à nouveau cette paroi suspendue entre ciel et terre, derrière Christophe Profit.

1988 / 24' / France • DCP (d'après 16 mm) • Son mono

Image Laurent Chevallier, Denis Ducroz • Son Olivier Schwob, Bernard Prud’homme • Montage Marie Quinton • Mixage Julien Cloquet • Direction de production Françoise Buraux • Producteur délégué Yves Jeannneau • Avec le concours des guides Michel Arrizi, Richard Bozon et Frédéric Folliguet • Extraits du film « Etoiles et Tempêtes » de Gaston Rebuffat, avec l’aimable autorisation de François Rebuffat • Une coproduction : Les Films d’Ici et Antenne 2 • Avec la participation de Sandoz-France.

Grand-Prix du Festival « Neige et Glace », Autrans, 1988 • Prix du Public, Festival Mondial de l’Image de Montagne, Antibes, 1988 • Best « Mountainfilm Spirit », Festival de Telluride (USA), 1989 • Prix spécial du Jury, Festival du film de montagne, Banff (Canada), 1989.

Première diffusion télé : Antenne 2 / samedi 28 janvier 1989

Le Come-back de Baquet, par Barbara Levendangeur

Extrait du Catalogue 2005 du Festival international de Nyon, « Visions du réel ».

Dernier de ses films d’aventure sportive, Le Come back de Baquet est le seul documentaire de la série que Nicolas Philibert a entièrement crée. Cette comptine montagnarde relate la réédition d’un exploit et d’une amitié ; elle relie deux temps, deux actions : trente-deux ans après avoir réalisé la première ascension de la face sud de l’Aiguille du Midi en compagnie de son ami alpiniste Gaston Rebuffat, décédé depuis, l’acteur et violoncelliste Maurice Baquet gravit à nouveau cette paroi en cordée avec Christophe Profit – un alpiniste à qui Nicolas Philibert a déjà consacré trois films.

Ici s’annonce déjà tout l’univers du cinéaste : un goût prononcé pour la comédie et la mise en scène – le documentaire est truffé de petites scènes humoristiques qui se jouent des maladresses de Maurice – mais aussi un désir indéfectible de célébrer le partage et la solidarité. La corde prend d’ailleurs dans ce sens une dimension à la fois réelle et symbolique : elle relie, rassure et impose une responsabilité. Et elle participe à une ascension destinée à renouer avec l’absent, moment suspendu, quasi-mythique, où se conjure la mort. Une vertu réparatrice qui traversera toute l’œuvre du cinéaste. Tout autant que cette habileté à faire interagir les corps et l’espace, à soigner le cadre et la profondeur de champ. A voir ces corps collés contre la paroi ou suspendus entre ciel et terre, comme en harmonie avec la montagne, on sait déjà qu’un grand cinéaste documentaire est né.

Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
Le come-back de Baquet - Nicolas Philibert
En guise de note d'intention

On lira ci-dessous la brève note de présentation du projet adressée à Guy Maxence, responsable de l’émission hebdomadaire « Les Carnets de l’Aventure » (Antenne 2), printemps 1988.

 

 » Un journaliste du New York Times m’attend dans ma loge. Papier et stylo en main, il commence :
– « D’où êtes-vous ?
– Du Beaujolais. Je suis caladois ».
Les caladois sont les habitants de Villefranche-sur-Saône. Il ne le savait pas ! L’interrogatoire continue :
« Comment peut-on vous classer ?
– Violoncelliste-skieur.
– Combien gagnez-vous avec ça ?
– Pas grand chose !
– Combien êtes-vous dans votre cas ?
– Tout seul. »
Ayant écrit ces derniers mots, il sort lentement de ma loge, comme écrasé sous le poids d’une immense fatigue.

Maurice Baquet, in On dirait du veau, Editions JML

 

Sait-on que le violoncelliste et acteur Maurice Baquet fut aussi un montagnard de renom ? Que dans les années Trente, entre deux représentations théâtrales du Groupe Octobre, qu’il animait avec les frères Prévert, Marcel Duhamel, Jean-Louis Barrault, Raymond Bussières et quelques autres, il se précipitait dans les Alpes pour disputer, sous les couleurs françaises, des compétitions internationales de ski ?

Sait-on que cet homme qui joua du violoncelle sur toutes les scènes du monde, qui s’illustra dans l’opérette, au music-hall et incarna plus de cent vingt rôles à l’écran, des Bas-fonds de Jean Renoir à Bibi Fricotin, fut aussi le compagnon de cordée du grand alpiniste marseillais Gaston Rebuffat ?

Juillet 1956 : Gaston en tête, la cordée Rebuffat-Baquet réalise une « première » parmi les plus convoitées de l’époque, celle de la face sud de l’Aiguille du Midi (3842 mètres), magnifique paroi de granit rouge se dressant comme un rempart au-dessus de la Vallée Blanche, dans le Massif du Mont-Blanc.

Août 1988 : comme pour saluer la mémoire de son ami Gaston aujourd’hui disparu, Maurice Baquet gravira à nouveau cette paroi suspendue entre terre et ciel derrière celui qui, de 50 ans son cadet, est considéré comme l’un des meilleurs alpinistes contemporains : Christophe Profit.

Ce « come-back » en paroi, trente-deux ans plus tard, constituera l’action du film…

Parce qu’elle a suscité tous les rêves, tous les défis technologiques ou sportifs, parce que le Mont-Blanc est son tuteur, parce qu’un téléphérique – le plus haut du monde ! – met son sommet à la porté d’un demi-million de touristes chaque année, l’Aiguille du Midi est l’une des montagnes les plus célèbres de la planète.

Quant à cette voie d’escalade qu’ouvrirent dans sa face sud Rebuffat et Baquet, elle est devenue aujourd’hui l’une des grandes classiques du Massif du Mont-Blanc. Itinéraire difficile, soutenu, très athlétique, « La Rebuffat » comme l’ont baptisée les alpinistes attire chaque été des centaines de cordées… au point qu’il faut parfois faire la queue avant de pouvoir s’y lancer !

Bien entendu entre temps les pratiques, les mentalités ont considérablement changé. On ne grimpe plus guère aujourd’hui pour « vaincre » un sommet. Ce qui compte désormais c’est la préoccupation esthétique, la sensation pour elle-même…

Juillet 1956 : Rebuffat et Baquet sont en pleine ascension quand brusquement le temps se gâte. Et c’est sous une tempête de neige qu’ils parviennent au sommet. Les deux hommes se réfugient dans la benne du téléphérique et regagnent discrètement Chamonix. Dès leur arrivée, une fanfare, des feux de Bengale… Gaston et Maurice n’en croient pas leurs yeux. Quel triomphe ! Ils avancent parmi la foule au pas cadencé… lorsque tout s’éclaire : n’est-on pas le 14 juillet ?

Août 1988 : voici donc Baquet de retour dans cette face vertigineuse, précédé de son nouveau complice, Christophe, auteur de grands exploits solitaires, dont la fameuse « trilogie » hivernale Grandes Jorasses-Eiger-Cervin…

La voie se gravit désormais en « libre », c’est-à-dire en utilisant uniquement les aspérités du rocher et non en s’aidant de pitons, d’étriers et autres moyens artificiels comme ce fut si longtemps le cas.

Bien sûr Maurice n’en mène pas large, et pour cause : la paroi est insurmontable !

Mais quoi ? Douterait-on que son humour puisse triompher des pires obstacles ? Et que le cinéma produise des miracles ?

Nicolas Philibert

Extraits

« Juillet 1956 : Gaston Rebuffat et Maurice Baquet réalisent la première ascension de la face sud de l’Aiguille du Midi, paroi de granit rouge dressée à 3842 mètres dans le Massif du Mont-Blanc. Août 1988 : pour saluer la mémoire de son ami disparu, Maurice Baquet récidive, malgré son âge, et gravit à nouveau la même paroi derrière l’un des plus grands alpinistes au monde, Christophe Profit, de cinquante ans son cadet. Exploit suivi par la caméra de Nicolas Philibert qui, par-delà l’aventure proprement dite, trace en petites touches un remarquable portrait du comédien violoncelliste, toujours passionné de montagne. Très peu de paroles, mais des attitudes, des clins d’œil qui en disent long sur les multiples talents de cet ancien skieur de l’équipe de France qui, dans les années Trente, animait avec Jean-Louis Barrault, Jacques Prévert et quelques autres, le groupe surréaliste Octobre. Une véritable redécouverte de ce surdoué, et un excellent moment de télévision intelligente. »

Bernard Heitz, Télérama, 28 janvier 1989

……………

« …Pour ce qui est du violoncelle, ou du jeu, on ne présente plus Maurice Baquet. Côté montagne, c’est une vieille histoire – d’amour – que le réalisateur Nicolas Philibert nous raconte en 23 minutes et 46 secondes. Impossible de comprendre tout le temps comment Philibert réussit à filmer l’escalade mais chaque image, chaque plan rend compte, tendresse et précision mêlées, de l’exploit. Contre-jours et gros plans. Et Baquet a bien évidemment un paquetage un peu spécial : le violoncelle… »

M.S., Libération, 28 janvier 1989

……………

« …Plus qu’un simple clin d’œil, le film de Nicolas Philibert est un hommage. Dans ce reportage, Maurice Baquet conserve la verve et l’insouciance d’un éternel gamin. Le voisinage des deux hommes Baquet et Profit, et les images d’archives soulignent les progrès techniques d’une discipline qui, il y a une quinzaine d’années encore, ne se concevait pas sans l’aide d’un matériel encombrant. D’artificielle, l’escalade est devenue libre. L’homme est seul face à la paroi.

Dans les années Trente, entre deux représentations du group Octobre, Maurice Baquet partait rejoindre Gaston Rebuffat qui incarne, à l’égal d’un Tabarly pour la voile, l’une des plus hautes figures de l’alpinisme français. Baquet, comme aujourd’hui encore, arrivait à Chamonix avec son violoncelle sous le bras, fidèle compagnon qui l’accompagne dans tous ses déplacements, et auquel il consacre plusieurs heures par jour. Dans ce film, on le voit offrir aux paysages alpins quelques notes de Bach ou donner une leçon à Christophe Profit, plus habile en paroi qu’un archet à la main. La qualité de ces images, outre une réalisation très soignée, vient de leur gratuité. Et ce reportage, qui ne vend aucune actualité mais simplement un peu de poésie, convient d’être salué comme une réussite. »

Benoît Charpentier, Le Figaro, 28 janvier 1989